Io, satellite galiléen de Jupiter - Partie 2

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La puissante influence de la géante Jupiter

L'effet de marée

Pourtant, on s’interroge de suite sur l’origine d’un tel climat torturé. En effet, sa distance par rapport au Soleil devrait en faire un astre très froid à l’activité géologique réduite, comme la plupart des autres satellites du système solaire externe.

On pourrait pourtant comparer la fureur de Io à celle de Vénus, à la différence que l’enfer qui règne sur l’étoile du berger trouve son explication dans sa proximité par rapport au Soleil.
La raison est donc toute autre pour Io. Le fait est qu’elle orbite exagérément près de Jupiter, ce qui a pour conséquence d’exercer sur elle un très puissant effet de marée. Nous connaissons nous même l’effet de marée, pour le vivre au quotidien au sein de notre système Terre-Lune : La rotation de la Lune crée une attraction qui fait se mouvoir les océans terrestres, et occasionne un léger renflement sur la surface terrestre, et vice versa.

Pour le couple Jupiter-Io, l’effet de marée est démultiplié. D’une part à cause de la grosseur de Jupiter qui engendre une force d’attraction bien supérieure à celle de notre planète, et d’autre part à cause de la proximité relative de Io par rapport à sa planète.
En outre, il est important de préciser que Io subit un effet de marée multiple, car Europe, autre satellite de Jupiter orbitant plus haut que Io, entre en résonance avec Io : Si Io orbite en 42.5 heures, Europe orbite en 85 heures ; ainsi, quand Europe fait un tour, Io en fait deux. A chaque rencontre, les deux astres s’attirent et se déforment mutuellement. Ganymède interagit également avec Io et aggrave encore un peu plus les perturbations gravitationnelles du petit astre : Le trio est en résonance orbitale dans un rapport 4/2/1. Io présente toujours la même face à Jupiter, ils sont en rotation synchrone (comme la Terre et la Lune, ou Pluton et Charon).
Ce qui résulte de ces attirances gravitationnelles conjuguées, ce sont des déformations de plus de 100 mètres d’amplitude sur Io. Pour comparaison, l’effet de marée que provoquent la Lune et le Soleil sur la Terre ne déforme celle-ci que de quelques dizaines de centimètres …

illustration de l'effet de maree resonance

Toutes les 42 heures, l’énergie déployée est de l’ordre de 1014 watts, soit 40 fois celle de la Terre, alors que le satellite est d’une taille comparable à la Lune.

La magnétosphère de Jupiter

Dans son orbite, Io traverse les lignes de la magnétosphère jovienne, créant de cette façon un courant électrique. Ce courant, bien que faible par rapport à l’énergie déployée par les effets de marée, représenterait tout de même la bagatelle d’1 trillion de watts. Le courant électrique est suffisamment puissant pour arracher à la surface une tonne d’atomes ionisés (sodium, souffre et oxygène) par seconde. Cette matière est capturée par le champ magnétique de Jupiter, ce qui forme entre la planète et son satellite un nuage de plasma qu’on appelle le tore. Ce tore rayonne puissamment dans le domaine ultraviolet et étend de façon exceptionnelle la magnétosphère de Jupiter. Toute cette matière, entraînée par le champ magnétique jusqu’aux pôles de Jupiter, crée des aurores polaires sur la surface jovienne.
La sonde Galileo a relevé des données nous permettant de penser que le petit satellite possède même son propre champ magnétique.

L’orbite très rapprochée de Io offre donc un environnement très perturbé et riche en radiations.

tore de io

aurores de jupiter

Composition interne de Io

Un manteau en mouvements

La structure interne de Io est quelque peu moins bien connue que sa surface. Mais les missions Voyager et Galileo ont toutefois permit de donner quelques éléments de réponse. Ainsi, on pense que, contrairement aux autres satellites des géantes gazeuses, Io (et peut-être aussi Europe) est principalement faite de roches de silicates en fusion. Io possèderait un noyau ferreux de 900km de rayon. Les 2/3 du magma proviendraient du manteau supérieur (de 100 à 200 km) et le tiers restant du manteau inférieur (plus de 1000 km).
Les couches internes de Io sont donc en perpétuel mouvement du fait des phénomènes de marée, tiraillées de toutes parts, et en perpétuelle fusion, ce qui engendre d’incessantes déchirures à la surface par lesquelles s’échappent de gigantesques éruptions volcaniques : en moyenne 10 000 tonnes de lave par seconde et par volcan.

Remontées volcaniques

Io est donc le monde le plus géologiquement actif du système solaire. Sa surface est constamment renouvelée, c’est pourquoi aucun cratère d’impact météoritique n’est visible, contrairement à tous ses congénères. Pourtant, compte tenu de la très faible atmosphère (pas d’effet de serre) et de la froideur extrême du vide interstellaire, la température moyenne en surface est de l’ordre de -150°c. Les volcans sont bien plus chauds, puisque la matière éjectée peut atteindre 100°c et les coulées de lave plus de 1500°c. On pensait d’ailleurs, à la suite des missions Voyager, que les coulées de lave remontant du manteau étaient composées de souffre liquéfié, il est pourtant plus probable, compte tenu de l’importante température de la lave, qu’il s’agisse de roches de silicate bouillantes.

strutucre inerne io volcan pelé haemus mons

Io, un laboratoire de chimie primitive

Le quotidien sur Io est donc fait de gigantesques panaches de soufre qui retombent en averses de neige sur la surface, de lacs de laves bouillonnants au fond des calderas, de longs fleuves de magma en fusion sillonnant les plaines, changeant de vitesse et de couleur selon les circonstances … Des geysers explosant à la surface, lorsque les sulfureuses nappes phréatiques, remontant à la surface, viennent frapper les roches en fusion. Sur ce sol instable et imprévisible, des falaises entières s’effondrent sous leur propre poids, des montagnes s’écrasent et s’enfoncent dans le sous-sol. Sous ses allures de maison du Diable, Io a toutes les caractéristiques d’un astre primitif, et on pourrait le considérer comme une machine à remonter le temps et se faire ainsi une idée de ce qu’a connu la Terre dans sa prime jeunesse. Il a donc une place de choix dans notre intérêt toujours grandissant pour les mystères du système solaire

phases de io

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