Cette idée de la nuit noire semble si évidente à tout un chacun, que la plupart des gens ne se sont sans doute jamais demandé pourquoi … Et vous-même ?
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Cette question n’est pas si anodine que cela, car si on prend en compte l’existence des milliards de milliards d’étoiles qui existent dans l’espace, alors notre ciel ne devrait connaître aucune zone obscure … Et pourtant, le ciel est d’un noir d’encre !
Ce paradoxe taraude les esprits depuis des milliers d’années, depuis les philosophes de la Grèce antique jusqu’aux astrophysiciens contemporains … Mais pas de panique, car aujourd’hui, nous avons l’explication. Et si cette explication nous a manqué pendant plus de 2500 ans, c’est parce notre vision de l’Univers nous a induit en erreur. En effet, depuis Aristote, la pensée humaine admettait l’infini de l’Univers dans le temps et dans l’espace. C’est-à-cire que nous vivions dans un Univers qui avait toujours existé, un Univers sans changement ni évolution, autrement dit un Univers statique, donc sans histoire …
Et même si pendant des siècles ce paradoxe d’une nuit noire au sein d’un Univers infini provoquait des malaises idéologiques, c’est seulement grâce aux avancées de nos connaissances du siècle dernier que notre perception de cet Univers a radicalement changé de ce point du vue.
Car si la nuit est noire, c’est bien parce que notre Univers a une histoire, il n’a pas toujours existé !
Rappelons-nous pour commencer que cela ne fait que 400 ans que nous avons compris que la Terre est ronde et qu’elle n’est pas le centre de l’Univers, que le Soleil est une étoile et que les étoiles sont toutes des Soleils … Avoir pu comprendre cela était déjà un grand pas dans notre perception du monde car si les étoiles étaient des Soleils, alors la différence d’éclat entre elles et notre étoile leur imposait forcément une distance phénoménale.
Oui mais cette idée collait toujours avec celle d’un Univers infini … Et c’est Johannes Kepler qui se demanda pourquoi alors ne voyait-on pas venir de toutes les régions du ciel l’éclat brillant et brûlant de la somme de toutes les étoiles de l’espace, créant un écran lumineux uniforme ?
Pour illustrer cette interrogation, placer une grande quantité de gommettes rouges sur une grande feuille blanche, vous obtiendrez une quantité importante de points rouge sur fond blanc … Mais éloignez la feuille encore et encore, il arrivera un moment où les points rouges disparaîtront mais où la feuille vous semblera uniformément rose, car votre regard ne saura plus résoudre les points rouges. Certes, mais la « lumière » des points rouges vous sera toujours révélée, car votre feuille sera rose. Alors pourquoi cela se passe-t-il différemment dans le ciel ? Pourquoi n’est-il pas uniformément lumineux ?
Et là où l’histoire est réellement incroyable, c’est qu’après que les longues recherches d’illustres astronomes comme Nicolas Copernic, Johannes Kepler, Edmond Halley (…), soient restées infructueuses … La réponse vint d’un écrivain et poète, un homme de lettres.
Mais un homme de lettres qui s’intéressait aux sciences : Edgard Allan Poe.
Poe fut le premier à dire ceci, dans un de ses textes intitulé « Eureka » : Imaginons que la lumière des étoiles les plus lointaines de notre ciel, si nombreuses soient-elles, n’ait pas eu le temps nécessaire pour parvenir à notre regard, alors le ciel s’en trouvera moins lumineux.
Sa réflexion est correcte, et sans le mentionner directement, il jette un pavé dans la mare en postulant que l’Univers n’a pas toujours existé.
Cette affirmation est donc exacte et colle parfaitement à la réalité, mais elle est incomplète, car un autre phénomène (jusqu’alors inconnu) contribue à la noirceur du ciel.
Cet autre phénomène, observé pour la première fois dans les années 1920 par Edwin Hubble, c’est l’expansion de l’Univers.
Cette expansion veut que toutes les galaxies s’éloignent les unes des autres. Non pas qu’elles se déplacent, mais c’est l’espace qui se dilue de lui-même.
Pire encore, on découvre que cette expansion est en phase d’accélération, c’est-à-dire que plus les galaxies sont distantes de nous, et plus elles s’éloignent vite.
Alors quelle incidence sur le fait que la nuit soit noire ? Hé bien cela tient au fait que lorsque l’espace moyen entre deux galaxies se dilue, l’intensité ou la densité lumineuse (non pas intrinsèque mais purement apparente) allant de l’une vers l’autre décroît.
Pourquoi ? Car la lumière a une vitesse finie, elle se comporte comme une onde, et une onde a une longueur donnée (ou période) qui s’exprime dans l’espace. Et quand l’espace se déforme, l’onde se déforme d’autant … Ainsi, l’espace se diluant, l’onde lumineuse s’allonge et perd en intensité.
Concrètement, la lumière subi un décalage du bleu vers le rouge, c’est ce qu’on appelle l’effet Doppler-Fizeau. D’un point de vue observationnel, cela se traduit donc par une baisse constante de la luminosité apparente des plus lointaines galaxies de notre Univers. A ce rythme, il arrivera un jour (certes très lointain) où l’Univers sera réellement sombre, vide et froid … Mais cela est une autre histoire.
Il y a donc un horizon visuel à notre Univers, et là bulle qu’il délimite s’appelle aujourd’hui l’Univers observable. Elle est estimée à 13.7 milliards d’années lumières de rayon. Cette distance correspond à l’âge théorique de notre Univers, elle est une frontière que nous ne pourrons jamais franchir.