Hubert Reeves

 

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La Ceinture de Kuiper

ceinture de kuiper

La ceinture de Kuiper, du nom de Gerard Kuiper, est un disque de débris trans-neptunien théorique n'ayant jamais été observé. Et pour cause, il est si étendu et si peu dense que c'est impossible ! Mais cette ceinture est bien présente, c'est elle la responsable des perturbations orbitales d'Uranus et Neptune ... Cette ceinture abrite de véritables mondes aujourd'hui reconnus et qu'on nomme les plutoïdes ...

Sommaire

parcourez notre gamme de posters sur les objets de la ceinture de Kuiper :

Histoire d'une ceinture théorique

Recherche de la planète X

Avant 1930, les astronomes ayant calculé des incohérences dans les orbites d’Uranus et Neptune, cherchaient à expliquer l’origine de ces perturbations gravitationnelles. C’est ainsi qu’en 1930, Pluton fut observée pour la première fois. Cependant, la joie fut de courte durée car sa petite taille et sa faible masse ne suffisaient définitivement pas à résoudre le problème. On se mit alors à chercher une dixième planète, nommée énigmatiquement « Planète X », pour expliquer le manque de masse nécessaire à ces perturbations orbitales.

La théorie de Gerard Kuiper

Suivirent vingt années de recherches et de calculs, qui aboutirent en 1951 à la théorie de Gerard Kuiper, planétologue américano-hollandais. Théorie qui disait que, lors de la condensation du disque d’accrétion fait de gaz et de poussières (de la nébuleuse primitive), des fragments glacés auraient pu se maintenir au-delà de Neptune, formant une immense ceinture – théorie qui avait en outre l’avantage de trouver une réponse claire à l’origine des comètes périodiques (ou à courte période, c'est-à-dire ayant un cycle inférieur à 200 ans). Pour résumer, les parties intérieures du disque se seraient condensées sous forme de planètes, et le bord extérieur, plus diffus, aurait produit un très grand nombre de petits objets.

Une théorie validée par l'observation

Ce n’est que 40 ans plus tard, en 1992, qu’on découvrit enfin par observation un corps céleste, nommé 1992 QB1, situé au-delà des orbites de Pluton et Neptune (en orbite quasi circulaire à environ 50UA du Soleil). Les années qui suivirent virent la découverte de centaines de ces autres corps. La théorie de la ceinture était donc validée, et on décida de l’appeler ceinture de Kuiper.
Pourtant, en 1943 et 1949, les mêmes arguments que Kuiper avaient été publiés par Kenneth E. Edgeworth, écrivain irlandais et astronome amateur. Ceci pour expliquer que la ceinture est parfois aussi appelée ceinture d’Edgeworth-Kuiper, en reconnaissance à sa contribution.

planet x

Un autre réservoir : le nuage de Oort

En 1950, en parallèle des travaux de Kuiper, Jan Oort démontrait qu’un réservoir de comètes à longue période bien plus éloigné et bien plus fourni existait à une distance si loin que l’influence du Soleil y est minime. Si minime que le passage d’une étoile proche suffirait à perturber ces corps glacés et à les projeter vers l’intérieur, ce qui alimenterait la ceinture de Kuiper. Cet énorme réservoir à comètes s’appelle le nuage de Oort, nous développerons ses caractéristiques dans le chapitre suivant.

Des astres connus depuis longtemps appartiennent à la Ceinture de Kuiper

Cette découverte de la ceinture de Kuiper a sans aucun doute sonné le glas de la recherche le la planète X, censée orbiter derrière Pluton (même si Sedna est venue semer le doute pendant un certain temps). En effet, la présence de la ceinture explique à elle seule les anomalies orbitales de Neptune et Uranus (notamment l’inclinaison orbitale d’Uranus). D’ailleurs on a déduit qu’un de ces objets trans-neptuniens serait entré en collision avec Uranus, ce qui l’aurait fait basculer jusqu’à modifier son axe de rotation … On pense également que Triton (satellite de Neptune) serait un ancien gros objet de la ceinture, lui aussi percuté, ce qui expliquerait sa rotation rétrograde. De plus, Pluton et Charon gravitent sur une orbite assez excentrique, qui ne s’accorde pas à la théorie d’une formation ordinaire à partir du disque proto-solaire. Il est vrai que ces deux corps n’ont pas une constitution type des planètes gazeuses ou telluriques. Aujourd'hui, Neptune est en réalité la dernière planète du système solaire. Autre argument, Triton, Pluton et Charon, ainsi que Sedna ont une densité similaire et leur caractéristiques sont de même nature (même atmosphère de méthane et surface de roches et méthane gelé). On peut alors aisément conclure que tous ces objets ont été formés à l’extérieur du système solaire, plutôt dans la ceinture de Kuiper qu’au voisinage de Neptune.

kuiper et oort

Tous les chercheurs ne se résolvent néanmoins pas à abandonner l’idée d’une dixième planète. Sur les traces de Lowell, Tom Van Flandern et Bob Harrington (décédé en 1993) ont notamment démontré que les perturbations du mouvement de Neptune pouvaient trouver une explication dans l’existence d’une planète ayant entre deux et cinq fois la masse de la Terre, et étant située entre 50 et 100UA.
Cette théorie est bien entendue rejetée par l’écrasante majorité des scientifiques depuis les découvertes objets de la ceinture, tels que 2001 KX76, 1992 QB1, 1993 FW, etc …

Des objets difficilement décelables

Aujourd’hui, l’existence de cette ceinture de Kuiper fait l’unanimité, cependant il est étonnant qu’on n’arrive pas à découvrir plus d’objets que ceux déjà répertoriés … Cela s’explique probablement par le fait que les orbites de ces corps glacés sont très instables, du fait des influences gravitationnelles de Neptune, ce qui compliquerait fortement les calculs qui permettraient de les repérer et plus simplement les observations.
Actuellement, les deux sondes Pioneer10 et Voyager1 sont aux confins du système solaire, à 70UA, et voyagent à la vitesse de 2.6UA par an. Ces deux sondes émettront pendant encore quelques années des signaux radioélectriques … Dans le cas où ces signaux seraient infiniment décalés, ce serait la preuve qu’il existe là-bas des corps inconnus qui orbitent autour du Soleil, de quelque importance gravitationnelle que ce soit. Le problème, c’est que nous ne savons pas quelle est la chance pour ces sondes de rencontrer l’un de ces objets, dans toute l’immensité de l’espace.

Un enjeu considérable pour notre compréhension du système solaire

La découverte d’un nombre maximum de ces corps gelés serait précieuse pour notre compréhension de la formation de notre système solaire, en effet il est fort probable que les objets de la ceinture de Kuiper sont des « restes » primitifs des phases précoces d’accrétion du système. Notamment les plus gros corps qui ont subi très peu de modifications depuis leur formation et qui révèlent donc la composition du système solaire primitif. On pense que la partie extérieure du disque était moins dense en gaz et poussières et l’accrétion de ces « grumeaux » de matière aurait été bien plus lente que la formation des planètes, situées plus près du Soleil, dans un environnement bien plus riche et dense. On est estime à 70 000 le nombre de ces objets dits « trans-neptuniens » qui dépassent les 100km de diamètre, situés entre 30UA (orbite de Neptune) et 50UA.

Plutoïde / Planète : distinction faite !

Nous avons vu, dans le chapitre concernant la découverte de Sedna, que la frontière entre planète et astéroïde devenait de plus en plus floue : d’où l’invention du mot plutoïde, compromis entre les deux. La confusion est telle qu’il aura fallut que l’UAI statue et modifie notre vision du système solaire en votant une nouvelle classification des objets de ce dernier, en Août 2006. C’est ainsi que Pluton (et son compagnon Charon), considéré pendant 75 ans comme étant la neuvième planète du système solaire, a perdu son statut de planète pour celui de « planète naine ». Il est vrai que si nous devions attribuer le titre de planète à chaque corps de plus d’un kilomètre de diamètre découvert dans la ceinture, le système solaire présenterait alors probablement un cortège de plusieurs dizaines, voire centaines de planètes !!
Suite aux diverses observations, on a constaté une nette diminution d’objets au-delà de 47UA. Cela semble indiquer que la ceinture de Kuiper se termine vers 50UA. Depuis la découverte de Sedna, on pense pourtant qu’il existe quelques corps qui voyagent entre la ceinture et le si lointain nuage de Oort

pluton charon nix hydra

Classification des objets de la Ceinture de Kuiper

Il est très difficile d’étudier la composition d’objets si éloignés. Néanmoins, plusieurs analyses spectroscopiques ont pu être effectuées. Il en ressort des similitudes avec les corps comme Pluton, Charon et Triton : en effet certains objets semblent recouverts de méthane et autres hydrocarbures légers (1993 SC), d’autres semblent plutôt posséder de la glace d’eau à la surface (1996 TO66).
Les objets de la ceinture de Kuiper sont notés KBO (Kuiper Belt Objects). On les classe en plusieurs catégories :

Les objets dits « classiques » (CKBO)

 Exemples : Ixion, 1999 TC36 (+ son compagnon), et Quaoar (le plus gros, avec ses 1300km). L’archétype des corps de la ceinture de Kuiper est l’objet 1992 QB1, qui est un objet « classique ». On le qualifie de classique car il présente une orbite faiblement excentrique, comme on s’y attend de tout objet formé par lente accrétion dans un disque dynamiquement froid. L’inclinaison orbitale de certains CKBO varie parfois jusqu’à des valeurs supérieures à 30°, comme pour 1996 RQ20 et 1997 RX9. Cette anomalie suggère que ces petits corps on été soumis à une influence extérieure non identifiée pour le moment.

Les plutinos (PKBO)

Objets en résonance 2:3 avec Neptune (ex : 2001 KX76), Pluton est le plus gros.

2001 KX76

Les objets dans d’autres résonances que les plutinos

1:2, 2:5, 3:4, 3:5, 4:5, ou 4:7.

Les objets épars (SKBO)

Objets ayant une orbite excentrique (probablement perturbée par un gros corps), proches du bord interne. On connaît maintenant assez d’objets de ce type pour les différencier des plutinos et des classiques. Exemple : 1996 TL66, 2002 AW197 (le plus gros avec 724km).

Enfin, certains objets n’entrent dans aucune de ces catégories.

Le ballet des comètes

On sait que c’est Neptune qui attire et précipite les comètes et les astéroïdes vers l’intérieur du système solaire, certaines passent à côté de la Terre et tournent autour du Soleil, mais d’autres restent coincées entre Jupiter et Neptune. On pense notamment qu’un groupe d’astéroïdes appelés les Centaures sont originaires de cette ceinture. L’un d’eux, Chiron, est d’ailleurs une comète active. Pour information, il faut savoir que la durée de vie d’une comète est très limitée, elle perd en effet une partie de sa masse à chaque cycle … Par exemple, la comète de Halley consomme un dix millième de sa masse à chaque révolution autour du Soleil, sa durée de vie est donc de 500 000 ans. Nous approfondirons les caractéristiques propres aux comètes dans le chapitre suivant, concernant le nuage de Oort …

Les Kuiper Belt Objects en quelques chiffres

Voici les caractéristiques de quelques objets parmi les plus gros de la ceinture de Kuiper :

KBO
Distance au Soleil (milliards de km)
Révolution (années)
Diamètre (km)
Découverte (année)
Pluton
5 900
248
2 200
1930
Charon
5 900
248
1 200
1978
2004 DW
5 920
248
1 305
2004
Quaoar
6 506
285
1 280
2002
Ixion
3 931
247.7
1 200
2001
Varuna
6 476
284.8
900
2000
1996 TO66
6 478
284.9
650
1996
EB 173
5 892
247.2
550
2000
SM 55
6 282
272.1
550
1995
1999 TC 36
5 901
247.7
550
1999
WH24 Chaos
6 893
312.8
550
1998
D E9
550
1999
kbo : kuiper belt objects

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